Le risque et la vie : la prise de risque entre regard expert et point de vue profane

 

Gilles Raveneau, ethnologue, Université de Paris Ouest Nanterre La Défense

L’objectif de cette communication est de comprendre comment coexistent les aspirations paradoxales à une existence prévisible et sûre et à une vie aventureuse et incertaine, comment s’assemblent et s’opposent l’attraction et la répulsion pour les risques et les prises de risque dans nos sociétés, tant du point de vue des individus que des institutions. Le détour par les activités physiques et sportives et par celui des conduites adolescentes étiquetées « à risque » par les experts en santé publique permettra d’une part, d’éclairer la problématique de la construction sociale des risques (pourquoi certains risques et certaines catégories de personnes apparaissent-ils à certains moments comme problèmes publics tandis que d’autres restent relativement ignorés ?), et d’autre part, d’envisager le point de vue des profanes pour comprendre ce qui justifie leurs pratiques (la prise de risque délibérée permet-elle de perdre ou de garder le contrôle, voire de le renforcer ? Quels sont les raisons de banaliser ou de diaboliser certaines pratiques ? La prise de risque est-elle une ressource identitaire ou une déviance ? Des règles de sécurité peuvent-elles devenir dangereuses et des prises de risque sécurisantes ?). Cette analyse permettra de poser la question fondamentale des rapports qu’entretiennent les risques que l’on court et ceux que l’on prend, la place qu’y occupent la rationalité et l’excès, la sécurité et le danger, les institutions et les individus. La prise de risque renvoie chacun de nous aux limites fixées dans l’accomplissement de son existence et à celles fixées par la société. Les inquiétudes des adultes vis-à-vis des « jeunes » par exemple les conduisent à se focaliser sur les conduites à risques des adolescents plutôt que sur celles des personnes âgées. Mais c’est bien parce que rien n’est jamais complètement assuré que le goût de vivre accompagne notre relation au monde quel que soit l’âge que l’on a.